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Eutopies

écologie, ecology, environnement, humanisme, art, humain, humanité

Notre-Dame-des-Naufragés

Un séjour sur l'île de Sein a inspiré au poète contemporain et parisien Olivier Apert un recueil de poèmes, Infinisterre. après avoir rappelé le dicton des marins "Qui voit Sein voit sa fin", il évoque les fantômes des naufragés et le vent qui peut rendre fou.

Loin de tout


à peine au-dessus


du niveau de la mer


PENN AR BED


avec pour consolation l'infini


comme ligne de partage entre nous


Je ne quitte guère l'épais manteau


de silence que tu m'invites à porter


le corps tourmenté par les sifflets


les austères sifflets des vents contraires


la tête craque sous le grain crépite


sous le soleil crève sous les nuages :


tant de linceuls miaulent les vagues...


 


IL N'Y A RIEN ICI qui puisse étonner


sinon l'étonnement d'être là


rien que cette fenêtre à ouvrir


pour que soufflant comme des chiens


les fantômes du large happent le regard


que la veille s'assimile au sommeil


que la nuit lente soit fumée au petit matin


 


ô ma fille la mer


comme tu sais parler à chacun


comment ta vague noire nous suicide


comment ta rumeur nous ressuscite


ô la mer ma fille


je te parle de chacun


et tu brûles ma cendre


infiniment bleue Notre-Dame-des-Naufragés


 


Occupé à guetter que vois-tu venir ?


Que vois-tu venir croix plantée là


à la pointe de chaque pointe


au bout


du bout du monde


Inishmore Inisheer Inishman


Sein Ouessant Molène


déambulatoires extrêmes étirés en caillou


la nuit


"le sang séché fume sur ma face"


les mouettes gémissent comme chats en rut


& de secrètes cérémonies s'accomplissent


dans les bars : les comptoirs en tremblent de


mémoire


 


Occupé à épier que vois-tu venir ?


des yeux rendus fous par le vent


des verres qui se brisent sur la digue


des dents jaunies par l'écume l'attente


des corps qui se jettent hors de leurs peaux


 


Au bout du


bout du monde


y aura-t-il un seul rocher monstre


pour me protéger


de tout ce que je n'ai pas su voir ?


Il appuierait son épaule contre


la mienne


murmurerait des chants immobiles


des cris d'avant les naufrages


avant de s'effondrer en prédisant


"la fin de l'histoire" & "la mort du sujet"


 


alors L'HOMME SEUL AVEC LUI-MÊME s'absente


horriblement :


il réussit même -c'est là la vraie grandeur-


à ne plus nommer les choses


 


Infinisterre, suivi de Crash


(c) Editions Apogée, 2006



DSC04313.jpg

 
jyjy

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on Jan. 27 2011

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